y h j o n l e u k h n
Caillou blanc
chemine tant que tu frayes le chemin
Poésie à lécoute de Mario Pardi, Artigiano
TIQUEL AYES
PREMIERS PAS
CAILLOUX DU CHEMIN
« Chaque idée est une responsabilité »
Je désire mastreindre à énoncer avec plus de clarté quelques pensées qui me sont venues depuis ladolescence.
Je les ai écrites et parfois réécrites, mais sans me soucier dêtre lisible, sans envisager sérieusement aucune publication.
Ainsi nauraient-elles donc servi à personne dautre quà moi.
Ces réflexions, ces ébauches de poésie, ces tentatives décriture, un manque de concision et de rigueur les ont rendues ardues sinon impénétrables.
Jélaguerai donc. Je serai plus explicite. Il le faut.
Car si "chaque idée est une responsabilité", cest prendre à cur cette parole que déclaircir davantage ma pensée.
Vaille que vaille, je nen serai responsable quà la seule condition quelle circule.
«HEUREUX CEUX QUI PLEURENT : ILS SERONT CONSOLÉS»
Aux orphelins de toutes les guerres,
Aux enfants de la Shoah
Aux voix égorgées
Aux mères esseulées
Aux pères assassinés
Aux opprimés de partout et de toujours
Aux affligées, aux affligés de ce monde
Aux victimes muettes des injustices
Aux victimes de la laideur criarde
Aux peuples qui désespèrent
Aux suicidaires
Aux refoulés
Aux mal aimés
Aux oubliés
Aux curs encore de pierre
mais autrefois en fusion
maintenant refroidis
mais qui peuvent
battre encore
pour autrui
battre pour
la vie
« Tu me révéleras le chemin de la vie,
la plénitude des joies
de Ta présence,
les délices
à Ta droite
pour
léternité »
HOMMAGE A ANDREI TARKOVSKI
Il te faut juste un peu plus dun demi siècle
pour accomplir ton uvre...
Tu auras le temps simplement
de tattacher sans tattarder à ce qui importe,
et quil importe de passer à tes contemporains :
ce dont ils ont le plus besoin.
Tu adopteras le langage que le plus grand nombre comprend :
celui des images.
Mais ne pénétreront vraiment ton uvre
que ceux qui en reparleront.
Tu toucheras en plein cur lâme quasi absente de tes contemporains.
Tu viendras dune façon forte, percutante, définitive,
renverser les sens interdits des bien pensant,
faire germer despérance scintillante laridité présente
rendre à la tribu le Verbe quil avait tu.
Tu viendras encore,
depuis que cette nuit tu es passé,
réveiller en nous,
par-delà la peur anesthésiante,
lexigence de croire dans la Rédemption.
Au-delà des apocalypses se promène patiemment
Celui qui a vaincu la mort, le semeur de lumière
Et cest auprès de lui quen ce moment tu te promènes.
Cest avec lui quen ce moment tu tentretiens.
Ta mort, je men doute, ton calvaire,
tu lauras vécu comme ton " sacrifice ".
A bientôt, jespère, frère lartiste
29. XII. 1986
A LORÉE DE LHORIZON
Certes, on aura sous-estimé leffet médusant
que peuvent avoir sur lactivité de milliers de gens
les sirènes dambulances qui traversent les villes
de ce dernier quart de siècle :
médusant dis-je, car ne suscitent-elles point
stupeur et angoisse, ne proclament-elles pas
la détresse indicible, lincontournable impuissance
des hommes aux prises avec Elle ?
Fallait-il alors quune si déchirante écorchure
sempare du silence de ce soir ?
Quant à toi dont lheure est venue :
ty retrouves-tu ?
Quen ces tenaillantes parois sonores,
puisse filtrer pourtant lévanescence
de la mélodie que tu as tant aimée,
en si bémol mineur
Lui revient-elle
maintenant que leffleure
lapaisement liminal ?
Ah! lultime phrase mélodique,
puisse-t-il limproviser en lécoutant chanter,
Et la vouloir instamment
tant quelle lui sourit,
léchappée sidérale qui luit
à lorée de lhorizon
On chante par là de très claire voix.
En elle lespace lumière sillimite.
Grande est la joie de la voix qui va tout droit vers toi.
OUVERTURE
Souvriront-elles
Les belles ailes ?
Séveillent-elles
Les prunelles ?
Sesbignent-elles
Les cascatelles ?
Vole, voile
Au-delà de leau sombre
File, fille
Au-delà de son ombre
Vole, voile
Au-delà de leau sombre
SINUOSITÉ
I
Rien de plus
profond
dans la vallée
que la rivière
qui doucement sy coule
qui doucement la creuse
II
Ny a-t-il que leau
qui puisse me lexpliquer
que leffort le plus dur
est de la laisser aller
la vie qui va, heureuse
III
Rien de plus
profond
rien de plus
sûr
que ma vallée
future
A Anne-Marie
PATIENCE
La patience est de la neige
qui tombe, tombe, tombe
qui se pose
Dans un blanc tapis de neige
qui se pose
La patience est de la neige
qui attend
en blanc
Les premières primevères
du printemps
La patience est fille de la mer
qui attend
patiemment
Lépanchement des rivières
primesautières
HAÏKAÏ
En géométrie
Quoique lombre soit tendre
Et contrastive
Linéairement
Sillimite la perspective
Trajet à suivre
VA
Va visiter
Dans les soleils
Qui peuplent
Tes galaxies intérieures
Les mille variations
De
lUni
Que
Lumière
.
SOUFFLE SUR LA BRAISE DU CUR
Dans la caverne de lignorance
Où lobscurité est totale et dense
Tu es entré.
Tu y as allumé une allumette
Sans regarder lombre immense.
Tu as fixé la flamme
Que le vent savant a soufflée.
Tu vis dans le souvenir dune flamme allumée.
Dautres allumettes tont été données
Que tu narrives point à allumer :
Elles sont toutes mouillées.
Où trouver du bois sec pour faire un grand feu ?
Vivre à jamais
Dans le froid des ténèbres ?
Ferme les yeux,
Et sens y luire une autre chaleur,
entends souffler Ses paroles
Sur la braise des curs
MARCHE DUN PAS AILÉ
Lavenir vient pour qui fait confiance.
Celui qui marche na pas peur de vaciller.
Seul celui qui sarrête et se retourne,
voit labîme le talonner, et vacille
Seul qui marche ne vacille pas, car vaciller,
cest perdre léquilibre stable de lêtre statufié.
Or qui marche a déjà renoncé à la stabilité:
il marche sans se soucier que labîme le talonne,
Sans se soucier que le solide quil vient de quitter
sest effondré dans le vide déjà
Et que seul le sol quil touche
de la pointe du pied le plus avancé
Osant le poser dans linvisible
le soutiendra le temps quil aura fallu
De faire allègrement un pas léger de plus
ESCALE ÈS ESPINES
Trois feuilles,
à elles seules,
Tendirent au ciel
la tendresse du cactus.
Dessous, le tronc dépines.
Je suis ton âme,
dirent les feuilles.
Nous ne sommes que cinquante-neuf,
dirent les épines.
Elles affectèrent
une forme en volute,
Espèce descalier dont chaque épine
imitait une marche.
Si tu grimpes, dirent les épines,
point de piqûres
Rends-toi à lheure où te ferons voir
ton cur en fleurs
APNÉE
Un instant retiens-toi de respirer,
et que soit suspendue notre respiration,
"Nel mezzo del cammin di nostra vita",
afin de
se dire simplement
que la vie naura pas paru plus longue
quune simple allée et venue dair dans nos poumons
et que toutes ces périodes figurent,
en quelque sorte,
les vies humaines de notre Humanité
toutes les fois quon aura pu dire :
"Voilà toute une vie"
car chaque prise dair sera rendue,
layant transformé, sen étant nourri
chaque vie reçue, rendue :
telle celles de Dante et de David,
Inspirés
sachant rendre
lesprit
Mais à Qui
chaque être de souffle
donne-t-il ainsi
de respirer
à perpétuité
parmi nous
comme si chacun de nous était
lune
de ses Paroles ?
PAROLE
sortie du sîlence
exîlée
elle
sy lance
*
parole et silence
ombre et lumière
jusquà ce que tour à tour
chaque parole replonge dans le silence
chaque ombre plonge dans la lumière
que le silence
telle la lumière
senrichisse
de chaque ombre
sombrée
de chaque parole
écoutée
silence dombre
parole de lumière
parole dombre
silence de lumière
***
N U A G E
Elle est nuage, la bouche de tes paroles
Elles sont sa pluie, sa neige, tes paroles
Dans le paysage dété de ma main,
Dans la vallée dhiver de lautre,
Jaccueille la pluie et la neige des cieux.
Car je suis terre et terre sèche,
Je suis oreille, oreille qui técoute.
Elle tombe doucement, la neige
Sur mes flancs.
Elle ruisselle, londée
Dans mes cheveux tout mouillés.
Tu memmènes, mentraînes
Tu me brasses, me chasses
Je ne suis plus terre, ni terre sèche
Je ne suis que limon, limon fertile
Et quand je parle, fleurissent des fleurs,
Et quand je pleure, naissent tes enfants.
La pluie, la neige, Oh! Nuage: tes paroles !
Elles ne retournent pas vers toi à vide !
daprès YeSHaYaH 55, 8-11
Tel quil fut rendu en français ardu par André Chouraqui
VEZELAY
Espace découte et dentente
des hommes, des femmes, des enfants
Espèce de tente
où tu écoutes,
venues dailleurs,
voyelles et consonnes
de la parole
et du silence
où tu lis
des pages et des pages et
où tu rêves dans les marges
où tu écris
Espace de lumière
Il tinvite à te ressourcer
à te reprendre
à te reposer
à recevoir
de limprévisible
à te donner
du temps
Un temps de gratuité
temps de grâce
sabbatique
Face à la colline
inspirée
LIGNE DE MIRE
Caillou considéré
Quelle intensité enlaça léveil de ta forme ?
Beau caillou, galet bleu
Lerrance pieds nus et las:
Une ligne sannonce aux confins de lerrance.
Rocaille qui gît
Gypse gigantesque qui bloque
Dyke épais qui sétrécit à son sommet
Roche foliacée qui frémit
Flysch
Puy nickélifère
Cromlech coruscant où pose
Lyttrialite
Non
Le diamant!
Diamant :
Acte îlien
tendu au-dedans
de la ténèbre des ères
PENSER QUUN CAILLOU BLANC POLI PAR LE FROTTEMENT DE LEAU ET DU TEMPS TATTEND
Caillou imperceptiblement déformé de traverser des années-lumière de millénaires,
par la lenteur et la densité de ta beauté,
la densité et la pleine blancheur de ta splendeur,
tu recèles la nuit qui veille,
la nuit toute simple avec ses rêveurs de profondeurs,
la nuit des sens de lhomme éveillé
Caillou tu les recèles
Quelle idiotie que de penser que le caillou traverse uniformément le temps
Comme si celui-ci était un continuum de part en part
et partout dans les mêmes conditions traversable
Alors quà lérosion revient la préséance,
à elle qui si menue soit-elle,
nasillant le parcourt
Le mouvement des astres dissipera le roc - en poussières
La présence ici de ce galet sur lequel coule et coulera toute leau den haut,
est don subtil.
Moins, assurément, que celle qui rend lun à lautre si présents
Un homme qui follement danse avec une femme
Une femme qui passionnément danse avec un homme
Leur parler de lui à elle - et delle à lui, une vie durant, assurément,
les érode davantage que tous les vents du monde.
Penser que,
de lagir de leur corps,
de leurs bras, de leurs mains, de leurs doigts,
de leur langue, de leur bouche,
de leurs jambes, de leurs pieds
de leur sexe et de leur cur,
de la façon dont ils se meuvent et quils saccueillent,
de celle dont ils accueillent le rythme de chaque être,
animal, végétal et minéral qui les nourrit,
de chaque chose qui leur arrive comme une première-née à leur amour confiée,
penser que de la manière dont ils sexpriment, chantent, parlent, peignent et se promènent
que de là
viendront à la voix de lAuteur du monde advenant qui les écoute aimer, peiner,
les tonalités vocales du nom nouveau quil va leur inventer, leur réserver,
et la graphie quà lencre de sa nuit,
sur le léger grenu du caillou blanc quil leur destine,
il tracera
POËME DE LAGNEAU
« Il y avait, dans le pays,
des bergers qui vivaient aux champs
et qui passaient les veilles de la nuit
à garder leur troupeau. »
Lhorizon de toutes parts
séparait linvisible du visible.
Les lignes donnaient aux collines leurs formes,
mais rien au-delà.
Depuis le tout début,
la lueur des astres et de laube
alimentait chez les bergers,
veilleurs de la nuit,
la soif et lespérance.
Pauvres, ils navaient pour richesse
que leurs rêves éveillés despérance
quils se racontaient facilement,
car entre eux régnait une grande transparence
et ils saimaient beaucoup.
Ils méditaient dans leurs curs la promesse
jadis faite à Yeshayah,
qui parmi tous avait écouté la voix du Seigneur,
ils la méditaient sous les étoiles,
dans la nuit de lattente :
« Hoïe ! Tous les assoiffés,
allez vers les eaux,
et qui na pas dargent, allez,
approvisionnez-vous et mangez,
allez, approvisionnez-vous sans argent,
sans prix, de vin et de lait ».
De linvisible
au-delà des collines
se fit entendre à eux
cette mélodie :
« Je donnerai gratis,
à qui a soif,
leau de la source de vie ».
Lun deux se leva,
étonné de ce que leur avait dit cette voix.
« Avez-vous entendu ce message ? »
demanda-t-il à ses amis
qui se trouvaient avec lui
autour des braises.
Ils se levèrent tous,
le regard tourné au-delà des collines.
Ils avaient parfaitement reçu le message.
Chacun savait que lheure était venue.
Chacun était prêt.
« Mon doux et tendre Jésus
Si lamour doit me tuer,
lheure en est venue ».
Telle était à vrai dire leur prière,
car ils étaient prêts à mourir pour lamour.
Ils étaient dun accueil parfait lun de lautre
et des autres.
Ils étaient comme une grotte nocturne
à limage du rien.
Un vent léger, une brise
vint aviver les braises presque éteintes.
Une flamme jaillit soudain des cendres rouges.
Laube à lEst blanchissait lopacité de la nuit
et le sommeil de leurs curs,
comme les étoiles,
se laissait fondre dans la lumière de laurore.
« Il nous est demandé un nouvel accueil dautrui »
se disaient-ils,
« allons voir ce qui se passe
du côté de létoile du matin ».
A peine en route,
avec leurs troupeaux de brebis et dagneaux
dont les clochettes tintaient aux champs,
« un ange du Seigneur fut près deux,
la gloire du Seigneur brilla autour deux,
et ils seffrayèrent dun grand effroi. »
Lange leur dit :
«Ne vous effrayez pas,
car voilà que je vous annonce une grande joie
qui sera pour tout le peuple :
il vous est né aujourdhui
un sauveur dans la ville de David,
cest le Seigneur messie.
Et voilà pour vous le signe :
vous trouverez un enfant emmailloté
couché dans une mangeoire.»
Ce nétaient bien sûr que des bergers.
Ce nétaient ni des savants, ni des intelligents.
Cétaient des curs purs tout simplement.
Parmi eux, il y en avait un qui létait encore davantage
et quon appelait le ravi.
Il avait parfois de ces paroles déplacées.
Par exemple, il fit la remarque suivante :
« Dans une mangeoire ? à Bethlehem ?
On ny trouvera que du pain,
si cest dans une mangeoire.
Mais si cest du bon pain,
cest mieux que rien ! »
Les autres ne prêtaient dabord
pas grande importance à ces mots,
mais arrivés près du gîte où la Vierge avait donné le jour à lEnfant,
ils navaient plus ni faim, ni soif.
Il y avait parmi ces bergers
un tout jeune garçon,
aveugle de naissance,
mais qui reconnaissait le bêlement
de chaque brebis, de chaque mouton,
et avait louïe si fine
que dans la nuit cest à lui que sadressaient ses frères,
lorsquune agnelle sétait égarée.
Ils partaient alors ensemble à sa recherche,
et souvent retrouvaient légarée.
Il avait grande mémoire aussi
et une voix chantante comme celle dun séraphin.
Lorsquil arriva près de Miryam et de Yosseph,
il ne vit pas le nourrisson au milieu deux,
mais il sentit à la jubilation de son cur
que le très-Haut, Celui qui est sur le trône,
sétait abrité près deux.
Il dit à voix haute à ses frères
qui avaient des yeux pour voir
et qui navaient encore rien vu :
« Jentends une grande voix, hors du trône.
Elle dit : «Voici labri, la tente de Dieu avec les hommes.
Il établit sa tente avec eux,
ils sont à lui pour peuple.
Elohim est avec eux,
Lui-même.
Exultez donc, cieux et vous qui vous y abritez »
Il dit encore: « Exultez !vous tous qui ce soir et demain
désirez que se crée par lamour réciproque
un espace plus vital, une paix plus forte que les guerres,
un Paradis plus vif
où linsécurité de ce siècle,
les calamités, la méchanceté ne résistent pas
à lAmour de Dieu pour chacun de nous.
Agneau perdu, toi qui lèves la tête et cesses
de brouter les brins dherbes sauvages
¾ qui poussent parmi nous, les cailloux ¾
Vers qui bêles-tu ?
LENDEMAIN DÉLECTIONS EUROPÉENNES
Europe
faite de vagues
dimmigrés
ayant
oublié depuis
si longtemps
leurs origines
ayant accaparé
ces terres
bribes
et brins de boutures
dazur
neiges
de tant détoiles
si filantes
Le rêve
dun enfant dhiver
sy fia
La sève
de laubier neuf
séleva
Solaires
tes Dents du Midi
savérèrent
sévères
et loin loin
Derrière elles
les crêtes
des plus altières
arêtes
parfirent
damples errances
en cordée
confièrent
aux hommes ici installés
le sourire
solitaire
de lenfant dailleurs
qui en rêve
confièrent
aux femmes dEurope
lespérance
aux yeux rouges
des colombes cachées au cur
noir de lAfrique
ESPÉRER LIMPROBABLE
Après que nous avons rencontré le renard,
nous avons attendu jusquà ce quil revienne.
Dès que nous entendions un bruit, nous sursautions,
non que nous ayons été pris par la peur,
mais nous étions si impatients de le revoir
« Ah ! " nous disions-nous, " Pourvu quil nous revienne ! »
Quoique la nuit nous ait surpris bien vite,
nous ne cessions de veiller en chantant doucement,
comme si le chant du vent là-haut dans le vieux chêne auquel nous étions adossés,
ne pouvait pas suffire à rappeler notre ami le renard
Et nous ne perdions pas espoir, malgré que la nuit fût noire.
Nous contemplions, sur le dos, des heures durant,
le scintillement de toujours plus détoiles et damalgames
Et puis rousse et soudain présente entre les cimes alentour
la lune qui montait tandis que tout tournait et se taisait,
hormis lespoir de le revoir
La lune, vibrant argent, descendait étreindre un horizon obscur
avant de sy fondre et de séteindre,
lorsque dans les profondeurs étoilées sest annoncée
une aube claire de lendemain tout bleu.
Aussi frais, aussi rond quest un galet, le jour alors est né.
Mais de renard, on nen vit point.
Nous avons mesuré notre patience à celle du chêne
et nous nous sommes inclinés.
Adossés à lui nous avons levé les yeux ensemble,
presque pour quil revienne
Un froissement parmi les bruns fanés des sous-bois dautomne :
Il était là.
Mais ne laissa quune trace à louïe
AU-DELÀ DE LÀ-HAUT
Je suis content de voir passer dans le ciel les hirondelles.
Pour moi elles dansent dans ma mémoire même en hiver lorsque delles nous sommes loin.
Leur danse crie dans le silence.
Dans le bleu sécrit leur parcours.
Attentif, je me déplace vite pour lire leur écriture.
Elles sont fidèles.
Elles reviendront.
Si on ne les chasse pas, elles nidifieront dans le même nid, sous la même corniche.
Elles se reproduiront encore.
Elles volent sans répit.
Vite
Elles volettent.
Elles ne sont jamais seules.
Elles sont au moins à deux.
Saccompagnent.
Survolent de très haut les autres oiseaux quand il fait beau.
Elles sont comme des points, des virgules bleu foncé dans le bleu clair de limmensité.
Jamais fatiguées, elles reposent un instant celui qui les suit du regard,
Qui les laisse entrer dans sa rêverie.
Elles tournent en volutes, en spirales,
Dont elles sortent heureuses
On ne saurait dire si elles connaissent la colère, la jalousie ou la haine.
On les devine joyeuses, allègres, gracieuses
Amantes du soleil, innocentes,
Les hirondelles sont belles.
Cest toujours elles qui me font fête, depuis lenfance,
Et moi, je ne sais comment les remercier, comment les recevoir,
Quand elles se pointent, comment leur accorder mon cur ?
Voient-elles le sourire qui se dessine sur nos lèvres ?
Entendent-elles que mon âme en exalte
Celui pour qui elles dansent ?
Songent-elles aux paysages
Qui rayonnèrent dans mes yeux
Lorsquelles mannoncèrent la première fois
LAilleurs,
Vraies messagères de lau-delà de la ligne des champs,
Signifiant doù elles viennent et où elles vont,
Vers le monde à venir,
Au-delà de ma raison, de ma maison,
Signalant lau-delà de ma compréhension,
Minvitant bien au-delà de ma main tenant mon bien,
au-delà de là-haut
MON AMI LE VENT
Il a lair de rien
son absence passe inaperçue
et sa présence si éphémère est passagère
Il apporte dailleurs les parfums et les senteurs,
parfois une pluie rose chargée de poussière de sables sahariens
Comme si le désert assoiffé de pluie
se donnait à notre soif à nous.
Le vent na pas le sens de lorient,
à tout bout de champ il perd le nord.
Mais en passant, il change les couleurs du ciel
et les fait passer du bleu au blanc.
Il tourne et senroule dans les clochers,
fait claquer portes et fenêtres,
empêche de dormir,
rend hystériques les malades.
A son gré, il fait planer les rapaces,
voltiger les mouettes,
hurler les forêts de grands feuillus.
Il plie le roseau,
casse ou déracine le chêne.
Dans la brise douce où vibre la rosée,
tu es, mon ami le vent, celui qui porte la parole,
tu es comme le sourire-même de celui qui te dirige
et joue avec toi comme avec un cerf-volant coloré
Quelles acrobaties te fait-il faire,
quand même, lair de rien
et quelles surprises
nous réserve-t-il ?
IL Y A DU BLEU EN LEVANT LES YEUX
La branche
porte sa famille de feuilles
La feuille
tient dune main la branche
Son poids
et sa légèreté
saccordent pour rythmer la danse
Verte de couleur
ici claire
ombrée au revers
Elle sourit
à sa voisine plus légère
plus svelte
Et à lautre
Elles composent
une présence
que visite la brise
Elles illustrent lété
alors quun pinson ségosille
ET PAR LA SUITE ?
*
Et par la suite
Une à une
la branche les lache
Elles dansent
sur laile
du vent
Elles chantent
sur lair
du bleu
Qui aime
laller
de la vie
De larbre
quelles
laissent
Enraciné
en lui
UNE VOIX QUI NEIGE A MA PORTE
Cest la trente-septième fois
au moins
que dans ma vie il neige
Et cest un rêve éveillé,
une veille ravie
et comme une fascination
Le désir me prend
de cette douceur
qua cette neige neuve,
le désir de men laisser blanchir,
recouvrir, adoucir
Bonne
est,
de la fumée du feu de bois,
lodeur qui tout embaume
Et belle,
la lenteur des flocons
qui la traversent
en sa bleuté légère
Mouettes grises
qui sur fond de transparence
rose clair très claire glissent
Où cest,
quà linstant,
va le désir de votre envol ?
«Voici »,
me dis-tu,
de ta voix de neige douce,
« voici que frappant je me tiens
à ta porte
dans le froid où tu me laisses »
« Me voici,
flocon pur, légèreté blanche, doux cristal étoilé qui descends de très haut,
traverses les pâles effluves bleus qui montent à ta rencontre.
Voilà
ta main,
ton regard tout voilé de frimas
et
ton sourire qui me réchauffes »
NOS OUI A TOI
*
Dans la grotte de la nuit
aux mille fissures détoiles
je désire puiser à la source du silence
moi ? rien: Toi mon être
Nêtre que de Toi
naître que de Toi
*
Il est si bleu,
il est si bleu que ça,
si bleu que les oui à toi
si bleu que je men réjouis
rien que de lécrire,
rien que de le dire,
rien que dy songer,
il est là-haut sur les névés de coton blancs,
il y accueille la lumière,
il y reçoit soleil, étoiles
il est si bleu,
le ciel
*
TU
as la tête couverte
dailes doiseaux chanteurs déployées
es là à leur sourire
à la légère voilure de leurs ailes
as attendu de lune en lune nouvelle
quà ton trône se réunissent tes compagnons
es ardemment désiré deux tous attendu
au festin que pour eux tu as préparé
***
FOCUS
feu de nuit - feu de jour
ardemment
art damant
brûle la nuit ardeur du jour
brûle le jour ardeur de nuit
feu de flamme
où coule le songe
séventent les vux
séteint ma parole
flamme du feu
où sécrit ta parole
sécoute sa parole
sentend
la douceur du chuchotement
des
dialogues damour
chuchotement
du
feu du feu
de
lamour
où naît
la
vie
du
vocable
amourir
CHANSON DU TROUVÈRE A SA DAME
Trouverai-je
encore
en Paradis
Ton sourire
damour
à moi versé ?
En moi
que ton sourire
éclaire
Claire
lenténébré
espère
De toi
surtout
immensément
se sait
se sent
aimé
Claire
me sais
me sens
aimé
clairement
appelé
à
aimer
à
en
briller
pour
toi
LA SPIRALE
À
?À
où ?
doù ?
dun point tournant du noir
aimant à blanc
soufflant
à
flux
et doù
sétend
le
yud
dAdonaï
et
lélan
des
particules
dions
des
sillons
diodes
violacées
des
traînées
halogènes
des
ciels
de
YHWH
byssus soyeux
de
spires bleues
dhélices
célestes
exilées
délices
si lestes
étalés
en
archipels
étoilés
ondes
et
vagues
essoufflées
de
fougères
envolées
et
déthers
végétaux
spirales
animées
souvrant
dici
vers
toi
et
moi
-
spirales
aspirées
par
toi
mouvance
évolutive
révolutée
à
en
perdre
et
lumière
et
vie
même
pétrifiées
les
ammonites
nous
indiqueront
le
sens
de
loù?
Rouable dans le four
dont tu nous tires
braises
du four
sels
des salines
DROITES GAUCHIES
Les droites parallèles
Lorsque passe le Souffle
que passe la Lentille
la Spirale
Sont tordues rompues
Leurs élans sont brisés, leurs forces éparpillées
Lorsque passe le Souffle
que passe la Lentille
la Spirale
Le champ magnétique de Celui-Celles-ci
malgré elles
Les fait partir à contre-sens
Les détruit, les chauffe à blanc, les défait
Et parce quil veut rendre éparse
la citadelle dorgueil
du moi
Il passe avec sa Parole de glaive
et
de sa seule puissance damour
en liberté
recrée en suspension
le pointillé
de nos élans
anciennes droites
désireuses
désormais
dêtre
par lui
gauchies
vers
lui
fléchies
LES NEUF PREMIERES PAROLES DE BEL-AMOUR RESSUSCITE
G u n a i , t i k l a i e i V ;
G u n a i , t i k l a i e i V ;
t i n a z h t e i V ;
M a r i a m
À
Femme, pourquoi pleures-tu ?
Femme, pourquoi pleures ?
Que cherches-tu ?
Mariam
Ecoute-nous
Marcher côte à côte
marcher parmi les ormes
à la lueur détoiles
marcher dans le silence
que fait pour nous la nuit
dans la forêt énorme
marcher côte à côte
avec Mathie qui
- présence aux traces
fraîches de lenfance,
à nos côtés marche avec nous,
à nos côtés à nous
qui sommes,
toi et moi
pour cette enfant
papa, maman
qui marchons
dans lart minimal
de la noirceur des troncs
qui glissent entre nous
et la lumière endormie
de clairières qui
veillent par derrière
Ecoute-nous